EXPRESSION CANTONAISE : « Ting lóuh pòh wah, wuih faat daaht » - « Ecoute ta femme parler et tu seras prospère. » Voici une maxime cantonaise qui tombe à pic pour tous ceux qui ont inscrit « Paix des ménages » sur leur « bucket list » (liste des choses à réaliser) pour l’année du serpent de bois, qui débutera officiellement le 29 janvier 2025. Coïncidence, la sonorité de ce conseil éprouvé de sagesse ancienne « Ting lóuh pòh wah, wuih faat daaht » (« Ecoute les paroles de ta femme et tu seras prospère ») a un petit air de famille avec celle d’un vœu de nouvel an lunaire. Il se trouve que le « faat » (發) de « faat daaht » (prospère, fortuné) est le même que celui de « faat choih » (devenir riche, faire fortune) de « Gung hei faat choih ! » pour « Vœux de fortune ! ». Ces souhaits de bonheur s’adressent à tout un chacun dès le premier jour de célébration du festival du printemps (premier jour du premier mois du calendrier lunaire chinois). En l’occurrence, « Ting lóuh pòh wah, wuih faat daaht » est une version plus littéraire de l’expression habituellement entendue à Hong Kong : « Pa lóuh pòh, wuih faat daaht », qui signifie « Crains ta femme, et tu seras heureux. » Dans le langage courant, l’avertissement donné à la gent masculine est nettement plus explicite. Rappelons qu’au Port au Parfum, traditionnellement, c’était la femme qui tenait les cordons de la bourse. A la moindre incartade, l’homme risquait d’être privé d’argent de poche. Depuis, les temps ont changé. Même si, sans doute, certains continuent d’y réfléchir à deux fois, « Pa lóuh pòh, wuih faat daaht » se dit surtout en plaisantant. Tandis que l’homme a conquis le droit de rire de ces mots, tel n’est pas le cas, en revanche, des enfants insolents remis dans le droit chemin par les deux injonctions « Ting wah le ! » - traduite littéralement par « Ecoute ! » ou « Sois sage » - et « Gwái gwái déi ! » équivalente à « Reste tranquille » ou « Sois calme ». Voici donc quelques expressions qui permettront d’aborder une nouvelle année du serpent de bois prospère, sereine, et en parfaite harmonie avec son entourage. Par EM à Hong Kong Photo: 04/05/2022 Cyclophiops major (Serpent vert), Pok Fu Lam - ©Keih Saht Le Quelques formules de vœux pour se préparer à la nouvelle année lunaire chinoise : Gūng héi faat chòih ! : Vœux de fortune ! 恭喜發財 Sān tái gihn hōng : Soyez en bonne santé ! 身體健康 Daaih gāt daaih leih : Vœux de bonne chance ! 大吉大利 Sām séung sih sìhng : Que tous vos souhaits se réalisent ! 心想事成 Gūng jok seuhn leih : Que le travail soit fructueux et harmonieux ! 工作順利 Lexique : Ting : Ecouter 聽 Lóuh pòh : Epouse 老婆 Wah : Parler 話 Wuih : Expression du temps au futur 會 Faat daaht : Florissant, prospère 發達 Faat : Prospérer, s’enrichir 發 Chòih : Argent, richesse 财 Faat chòih : Devenir riche, faire fortune 發財 Gūng héi : Souhaiter, Féliciter 恭喜 Gūng héi faat chòih ! : Vœux de fortune ! 恭喜發財 Pa : Craindre 怕 Gwái : Etre à la fois calme et gentil, avoir un comportement exemplaire 姽 Gwái Gwái Déi ! : Soyez calmes et gentils ! 姽姽哋 Jongler avec les mots : https://www.keihsahtle.com/jongler-avec-les-mots.html
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ARTISTE : Inspiré par les espaces naturels, le photographe et sculpteur, Chan Yue Hin, nous invite à flâner avec délectation dans son univers enchanteur. L’art souriant du photographe et sculpteur, Chan Yue Hin, raisonne comme une poésie à la musicalité pétillante. Une irrésistible joie de vivre, rafraîchissante et réconfortante, transpire de la plupart de ses œuvres. Sans doute reflètent-elles l’allégresse de l’artiste lorsqu’il est plongé tout entier dans son élément, la nature, sa source d’inspiration première. « J’ai besoin d’espace. Quatre choses sont très importantes pour moi, les beaux-arts, la nature, la verdure et la tranquillité, » confie-t-il. Naturellement, au lieu de vivre en ville, Chan Yue Hin a pris ses quartiers dans le village de Lam Tsuen, au cœur de la campagne bucolique de Tai Po (Nouveaux Territoires). C’est ici, loin des gratte-ciels, qu’il s’est installé après avoir vécu vingt ans en France, diplômé de l’École nationale supérieure des beaux-arts de Paris dans les années 70. Son atelier se situe dans le parc de sa maison ancestrale, havre de paix fleuri en toute saison, qu’il a lui-même agencé avec une délicate harmonie. Propice à la rêverie créative, ce refuge fait également office de musée intimiste. Chaleureux, l’artiste hongkongais qui parle le Français couramment, est ravi d’introduire à son univers enchanteur les visiteurs en quête de respiration, à l’écart du tumulte urbain. Rompant avec ses habitudes, Chan Yue Hin s’est toutefois rendu dans le quartier vibrant de Wan Chai au Hong Kong Arts Centre en novembre (2024), à l’occasion de sa première exposition auprès du public du Port au Parfum, appelée « Flânerie dans la nature » (en Anglais, « Contemplation in nature », en Cantonais 閑觀, « hàahn gūn » signifiant « Voir en flânant »). Photo 1 : 16/11/2024 Chan Yue Hin, Exposition « Flânerie dans la nature », Hong Kong Arts Centre Photo 2 : 08/12/2024 Chan Yue Hin, atelier de Lam Tsuen Photo 3 : 16/11/2024 Photographie et sculpture en olivier, Exposition « Flânerie dans la nature », Hong Kong Arts Centre Photo 4 : 16/11/2024 Exposition « Flânerie dans la nature », Hong Kong Arts Centre Photo 5 : 16/11/2024 Photographie « Les mémoires de la pierre », Hong Kong Arts Centre Photo 6 : 16/11/2024 Photographies, Exposition « Flânerie dans la nature », Hong Kong Arts Centre Photo 7 : 16/11/2024 Photographies d’orchidées et champignon, - Exposition « Flânerie dans la nature », Hong Kong Arts Centre Offrant un aperçu du travail prolifique de l’artiste durant les trois années de la pandémie de Covid-19, celle-ci a révélé 80 pièces de sa riche collection. Le flâneur citadin a pu y contempler des photographies lumineuses soulignant l’esthétique de la faune et de la flore de l’homme en symbiose avec la nature qui l’entoure, des sculptures en bois expressives aux formes surgissant du vivant, ainsi que des compositions pittoresques conçues à partir de coquillages, de céladons de Longquan, de céramiques antiques. L’une des photographies maîtresses interpelle, celle d’un mur rugueux longtemps travaillé par l’humidité tropicale, aux reflets argentés et piqué de pigments ambrés. Au premier coup d’œil, le spectateur a l’impression que la petite plante gracieuse, qui jaillit miraculeusement de la roche d’antan, est reliée par un filet d’eau à un galet brillant. Poli par des flots, son cœur est couleur rubis, serti de raies blanches et mordorées. En s’approchant, l’observateur reconnaît une pierre de Nanjing, appelée aussi pierre de fleur de pluie (雨蘤石). Lisant l’intitulé de l’épreuve, « Les mémoires de la pierre » (石頭記), il comprend que cette mise en scène se réfère au roman de Cao Xueqín du même titre, plutôt connu en France sous le nom du Rêve dans le pavillon rouge. « Il s’agit de l’œuvre littéraire chinoise classique la plus remarquable, » estime le photographe à l’esprit imaginatif. La pierre fleur de pluie évoque le roc que le héros de la saga, Jia Jade Magique (賈寶玉), incarnait dans une vie intérieure avant de le porter à son cou. La jolie plante, quant à elle, représente l’incarnation de l’amour (impossible) de ce dernier, Lin Jade sombre (林黛玉). Photo 8 : 08/12/2024 Chan Yue Hin dans son atelier de Lam Tsuen, derrière une sculpture de chouette (vue de face) en camphre, Atelier de Lam Tsuen Photo 9 : 08/12/2024 La sculpture de chouette en camphre devient un Philautus, vue de biais Photo 10 : 08/12/2024 La sculpture de chouette en camphre devient un Philautus, vue de derrière Photo 11 : 08/12/2024 La sculpture d’éléphant en camphre devient un oiseau, vue de derrière, Atelier de Lam Tsuen Photo 12 : 16/11/2024 Profil de tête de cop sculpté en camphre, Exposition « Flânerie dans la nature », Hong Kong Arts Centre Photo 13 : 16/11/2024 Insecte, Exposition « Flânerie dans la nature », Hong Kong Arts Centre Photo 14 : 16/11/2024 L’oiseau de feu (de Stravinsky) Exposition « Flânerie dans la nature », Hong Kong Arts Centre Photo 15 : 16/11/2024, Serpent du jardin d’Eden, Exposition « Flânerie dans la nature », Hong Kong Arts Centre Le compositeur s’amuse à tisser des liens entre les éléments qu’il pioche dans la nature et des références culturelles tant chinoises qu’occidentales. Il ne se prive d’ailleurs pas de lancer quelques clins d’œil espiègles à la culture française. Un exemple en est la sculpture du profil, bordé de rouge, d’une tête de coq à l’iris bleu entouré de blanc. D’autres représentations animales captivent, un éléphant au dos d’oiseau, une chouette épousant une silhouette de Philautus (la grenouille de Hong Kong) dès lors qu’elle est regardée de biais. Celles-ci sont en bois de camphre, tandis que le serpent doré du jardin d’Eden, qui apparaît dans plusieurs œuvres, est en bois d’olivier. « J’affectionne ce bois solide, au parfum doux, qui me rappelle la France. Un bel olivier grandissait dans mon jardin. Malheureusement, il a été déraciné par le typhon dévastateur de 2018. Depuis, j’utilise ses branches pour mes créations, » explique le Hongkongais attaché à l’Hexagone, où il voyage une à deux fois par an. Photo 16 : 16/11/2024 Représentations de la pluie, Exposition « Flânerie dans la nature », Hong Kong Arts Centre Photo 17 : 16/11/2024 Représentation de la mer, Exposition « Flânerie dans la nature », Hong Kong Arts Centre Photo 18 : 16/11/2024 Représentation du clair de lune, Exposition « Flânerie dans la nature », Hong Kong Arts Centre Photo 19 : 16/11/2024 Représentation de la porte du paradis, Exposition « Flânerie dans la nature », Hong Kong Arts Centre Photo 20 : 16/11/2024, Représentation de la chanson des Beatles « All you need is love », Exposition « Flânerie dans la nature », Hong Kong Arts Centre Photo 21 : 16/11/2024, Représentations des « 4 saisons » (Vivaldi) et de la Symphonie n°5 de Beethoven, Exposition « Flânerie dans la nature », Hong Kong Arts Centre Un autre élément récurrent de son œuvre est la pomme (en camphre) « symbole de la connaissance », teinte en rouge « pour l’esthétique. J’aime les couleurs du fauvisme, vives, intenses de Matisse, » précise-t-il. Son goût pour l’intensité se retrouve dans le bleu profond appliqué en arrière-plan de ses compositions pour peindre l’immensité de la mer et du ciel. Ce bleu outremer est d’une telle puissance qu’il semble chasser la pluie que l’artiste représente avec des pierres de fleur de pluie, suivant les lignes du caractère chinois 雨 (signifiant pluie). « La pluie, l’eau du ciel, provient des nuages. Cependant, derrière eux, le beau temps demeure, » constate Chan Yue Hin. Une manière simple et poétique de transmettre un message optimiste. Par E.M. à Hong Kong Chronique simultanément publiée sur le site https://www.lessoireesdeparis.com/ édité par Philippe Bonnet Visiter l’atelier de Chan Yue Hin : Contact : +852 9179 8983 ARTISTE : Le nouveau maître de l’indigo de Hong Kong, Eric Lam restaure et perfectionne d’anciennes pratiques ancestrales de coloration naturelle. Le bleu Hakka (客家藍, « haak gā làahm » en Cantonais), l’indigo local de Hong Kong, vit une seconde jeunesse sous l’impulsion du jeune Maître of Dye (Maître de la Teinture), Eric Cheung Chun-Lam, fondateur de Dyelicious. C’est dans son studio, au Jockey Club Creative Arts Centre (JCCAC) de Shek Kip Mei (New Kowloon), que le travail des pigments issus de la fermentation (dans l’eau) des feuilles d’indigotier, tombé en désuétude durant le règne du synthétique, retrouve ses lettres de noblesse. A l’intérieur du grand espace aéré, éclairé harmonieusement par la lumière du soleil, filtrée par le feuillage des banians, les artisans qui partagent la passion d’Eric Lam s’activent. Leurs mains bleuies par la teinture témoignent d’un labeur sans relâche. Dès sa création en 2012, Dyelicious, société soucieuse de l’environnement, a mis un point d’honneur à promouvoir le remplacement des produits chimiques industriels par l’utilisation de colorants naturels. Composée à ce jour de 6 personnes à temps plein, elle élabore, teste et enseigne avec ardeur de nouvelles méthodes de teinture dédiées à l’art et à l’éco-impression. Photo 1 : 22/08/2024 Eric Lam, Maître of Dye, exposition de batiks, Arts & Crafts (PMQ) Photo 2 : 26/11/2024 Eric Lam, Maître of Dye, au studio de Dyelicious, JCCAC Photos 3 et 4 : 26/11/2024 Eco-impressions au studio de Dyelicious, JCCAC Photo 5 : 26/11/2024 Entrée du studio de Dyelicious, JCCAC Ce projet ambitieux de perfectionner d’anciennes pratiques de coloration naturelle, grâce à la science et à des séries de d’expérimentations, a le vent en poupe. Chaque année, Dyelicious conquiert le cœur de plus en plus d’aficionados, accueillis chaleureusement dans ses locaux. Elle séduit des artistes du monde entier, à Taiwan, en Corée du Sud, au Japon, au Royaume Uni, en Italie, etc. Dépassant le stade de la simple curiosité, ceux qui désirent apprendre les techniques modernes d’application de l’indigo hongkongaise sont de plus en plus nombreux. C’est en 2016 qu’Éric Lam, « ingénieur et chimiste avant d’être artiste, » comme il se définit lui-même, a initié les premières recherches sur la culture locale de l’indigo, celle développée, jadis, par les Hakkas. Cette ethnie chinoise issue des Han, installée au Port au Parfum depuis le 17ième siècle, s’était principalement investie dans l’agriculture et le négoce des matières premières. A partir des années 60, en phase avec la montée en puissance de l’industrialisation, cette population a modifié son mode de vie, abandonnant sa coutume de teinter au bleu naturellement. Véritable retour aux sources, les premières investigations du fondateur de Dyelicious, ont porté autant sur les pratiques agricoles que sur celles d’extraction et de conception des pigments. Ces études des techniques traditionnelles de teinture développées par les Hakkas de Hong Kong se poursuivent encore, menées par l’académie ad hoc de Dyelicious, la Dyelicious Academy. Riche d’enseignements, cette immersion dans les anciens savoir-faire locaux a ouvert de nouveaux horizons au Maître of Dye. Son champ artistique s’en est trouvé démultiplié : « La teinture obtenue à partir de l’indigotier de Hong Kong permet de créer une palette de nuances de bleu élargie. Les tons produits se différencient nettement de ceux venant des autres espèces, indienne, japonaise, ou taïwanaise » décrit Eric Lam. Les bleus Hakka, intenses et lumineux, peuvent revêtir une couleur tendre et douce. Photo 6 : 26/11/2024 Cycle de fabrication du Bleu Hakka, Dyelicious, JCCAC Photo 7 : 26/11/2024 Plante d’Assam Indigo, Dyelicious, JCCAC Photo 8 : 26/11/2024 - Logo DIY de l’indigo local, Dyelicious, JCCAC Photo 9 : 27/11/2024 Nuances du Bleu Hakka sur une étole de Dyelicious Photo 10 : 26/11/2024 Echantillons de vêtements Bleu Hakka, Dyelicious, JCCAC L’espèce à l’origine de ces teintes typiques est le Strobilanthes cusia, appelée aussi Assam Indigo. « Nous ne savons pas si elle a été importée par les Hakkas dans la région ou si elle y poussait déjà, » s’interroge Eric Lam. Plante vivace qui affectionne l’ombre des montagnes, les rivières et le climat tropical, l’Assam Indigo peut se récolter deux à trois fois par an, en mai, en août ou fin octobre. « Le meilleur moment pour les cueillir demeure l’été. Une fois que la température descend au-dessous des 15 degrés, en décembre, les plantes fleurissent puis les couleurs s’estompent » détaille l’artiste chercheur qui participe activement à la relance de cette culture : « Plusieurs fermes locales situées dans les Nouveaux Territoires sont nos partenaires. Sans leur existence, le bleu Hakka disparaîtrait à tout jamais. » Pour l’heure, le bleu de Hong Kong rayonne grâce à la participation de Dyelicious à des expositions locales, tel Art Basel, et internationales. Justement, le Maître of Dye vient de remporter la médaille de bronze - en qualité de candidat étranger le plus haut classé - de la 19ième édition coréenne de la compétition « Natural Dyeing Product » (Produit de teinture naturelle), sur le thème « Coexistence of humanity and nature – a journey of memories » (Coexistence de l’humanité et de la nature – un voyage de souvenirs ». Son ombrelle aux motifs indigo décrivant magnifiquement divers quartiers de Hong Kong a conquis le jury. Photo 11 : Ombrelle teinte au Bleu Hakka, réalisée par le Maître of Dye, Eric Lam Photo 12 : 22/08/2024 Exposition de batiks du Maître of Dye, Arts & Crafts (PMQ) Photos 13, 14 et 15 : 26/11/2024 Batik bleu Hakka, Dyelicious, JCCAC Le talent d’Eric Chan n’a pas fini d’émerveiller. Son exploration du monde bleu ne fait que commencer : « Le projet de révéler le bleu Hakka naturel est celui de toute ma vie, » affirme-t-il. « Pour créer son originalité, il faut être tenace, se concentrer, ne pas abandonner au moindre obstacle. Il faut redoubler d’effort tout en acceptant que les choses prennent du temps. » A l’image des grands maîtres japonais qui s’adonnent à leur art toute leur vie durant, avec de surcroît l’habitude de transmettre leurs techniques artisanales de génération en génération, « il faut sans cesse perfectionner les techniques ancestrales, tout en les adaptant à l’époque moderne, » conclut le futur grand Maître of Dye. Par EM à Hong Kong Chronique simultanément publiée sur le site https://www.lessoireesdeparis.com/ édité par Philippe Bonnet Particuliers et entreprises, contactez Dyelicious pour visiter son studio, découvrir ses échantillons, ou participer à ses ateliers : Dyelicious : LO-04, G/F, JCCAC, 30 Pak Tin Street, Shek Kip Mei, Hong Kong http://dyelicious.hk +852-9858-3616 Réserver une visite : https://www.dyelicious.hk/bookonline Facebook: https://fb.com/dyelicioushouse Instagram: https://www.instagram.com/dyelicioushouse/ Youtube: https://www.youtube.com/user/Run2TreeStudio/videos MUSEE DE LA MARINE DE HONG KONG : Naviguant d’une collection à l’autre, le visiteur s’embarque, tel un explorateur, pour un voyage palpitant dans le temps. En quête d’une odyssée extraordinaire ? Rendez-vous sur le quai numéro 8 (Central Pier 8) pour embarquer à bord du Hong Kong Maritime Museum (HKMM, Musée de la marine de Hong Kong). Naviguant d’une collection à l’autre, chacune relatant un fragment du riche héritage marin du Port au Parfum, vous vivrez un voyage dans le temps époustouflant, avec en toile de fond, des jonques aux voiles tendues par des bambous, des pipes et jars à opium, des porcelaines de Chine, des peintures épiques témoignant de l’activité des Compagnies des Indes orientales, des manuscrits contant des histoires de pirates, etc. Sillonner la mer de Chine d’une dynastie à l’autre, puis jeter l’ancre au turbulent Victoria Harbour étourdit, parfois au risque de perdre le cap. Photo 1 : 08/11/2024 Extérieur du HK Maritime Museum - ©Keih Saht Le Photo 2 : 08/11/2024 Entrée du HK Maritime Museum - ©Keih Saht Le D’ailleurs, n'est-ce pas le moment opportun de faire le point, tandis que la Semaine Maritime 2024 de Hong Kong (Hong Kong Maritime Week 2024) s’ouvre. Ce rendez-vous annuel de toute la filière navale (du 17 au 23 novembre) se destine à tirer les leçons du passé, analyser le présent, deviner le futur pour mieux propulser (« to propel » lit-on sur sa description officielle https://www.hkmw.hk/en/aboutus.html ) Hong Kong sur une route florissante, avec son étendard, flottant au vent, de Place internationale prestigieuse. A ce propos, en flânant sur le pont C (Deck C) du HKMM qui dépeint l’histoire navale chinoise depuis la dynastie des Song (960 à 1279), le visiteur est invité à se souvenir que Hong Kong n’a pas toujours été ouvert au négoce avec l’Occident. Avant le traité de Nankin, signé le 29 août 1842 entre l’Empire du Milieu et la Grande-Bretagne à l’issue de la première guerre de l'opium, le seul port de Chine autorisé à commercer avec les étrangers était celui de Canton. Encore fallait-il respecter un ensemble de règles instaurées par l’Empereur Qianlong en 1757, appelé le « Système de Canton » (en vigueur jusqu’à 1842). Photo 3 : 08/11/2024 Carte du 19ieme, estuaire de la Rivière des Perles au HK Maritime Museum - ©Keih Saht Le Photo 4 : 08/11/2024 Navire, négoce d'opium, Lintin, 1824 , William John Huggins au HK Maritime Museum - ©Keih Saht Le Photo 5 : 08/11/2024 Chaise de véranda chinoise 19ieme, bambou et rotin, au HK Maritime Museum - ©Keih Saht Le Photo 6 : 08/11/2024 Affiche publicitaire, Grande Bretagne, 1894 au HK Maritime Museum - ©Keih Saht Le La dynastie Qing désignait des sociétés marchandes gérantes - contre une chère redevance payée à l’Etat - de tout le commerce entrant sur le Continent chinois. La mission de cette guilde monopoliste, surnommée par les Occidentaux « cohong » (déformation du mot gonghang, signifiant « marchand officiellement agréé »), était de se porter garante de chaque navire étranger (personnel compris) qu’elle autorisait à entrer dans le port de Canton. Dès qu’un vaisseau obtenait la permission de mouiller à Whampoa (aujourd'hui le district de Huangpu de Guangzhou), marchands et marchandises étaient transportés par des sampans sur un canal étroit. Ils rejoignaient enfin les « Treize Hongs », c’est-à-dire les 13 entrepôts des Cohongs, situés à l’extérieur des murs de la ville, où ils étaient confinés. Malgré moult obstacles, des restrictions et taxes changeantes, des rencontres avec les fameux pirates de Lintin (île à l’estuaire de la Rivière des Perles proche de Hong Kong et Shenzhen), des épidémies, des tempêtes, les négociants occidentaux voulaient accoster coûte que coûte, tant ce commerce avec la Chine du Sud était juteux. Par exemple, les marchands britanniques vendaient l’opium importé de leur colonie indienne en contrebande pour contourner son bannissement du territoire chinois, par un décret dès 1729. Ils le troquaient contre des lingots d’argent, échangés à leur tour contre de la soie, de la porcelaine et du thé dont l’Angleterre était fort friande. D’environ 2 000 kg par an à la fin du 17ième siècle, les importations de thé vers la Grande Bretagne atteignirent 42 millions de kg en 1855 ! En désaccord concernant le trafic d’opium, les deux partenaires commerciaux entrèrent en guerre. Le Port au Parfum devint britannique en 1842 puis fut rétrocédé à la République Populaire de Chine le premier juillet 1997. Photo 7 : 08/11/2024 Vue du HK Maritime Museum sur le Victoria Harbour d’aujourd’hui - ©Keih Saht Le
Photo 8 : 08/11/2024 Vue du HK Maritime Museum sur le Victoria Harbour d’hier et d'aujourd’hui - ©Keih Saht Le Au 19ième siècle, Hong Kong qui n’abritait encore que quelques villages de pêcheurs et d’agriculteurs, n’en demeurait pas moins l’un des ports naturels les plus prometteurs de toute la région. Sa population de 3 000 à 4000 habitants (à comparer à 7,5 millions environ aujourd’hui) s’enorgueillissait déjà d’une culture maritime et des affaires aiguisée, négociant matières premières, céramiques et poissons. Pour découvrir la suite de cette histoire portuaire fulgurante, le visiteur grimpe l’escalier qui conduit au Pont B (Deck B) du HKMM et entre dans la zone dédiée à la construction navale. Se frayant un chemin au milieu de cette bibliothèque impressionnante de photos témoins de l’évolution constante de l’infrastructure portuaire, de la conception des navires et de leur utilisation, le pèlerin, mis dans la peau d’un marin hongkongais, constatera que la vie du Port au Parfum n’a jamais été un long fleuve tranquille. Balloté par diverses crises, Hong Kong a toujours su renaître, tel le Phénix. Aujourd’hui, la course à la modernité chinoise et internationale lui lance un nouveau défi, celui de naviguer « vert », sur une mer bleue et propre, autrement dit de virer de bord en vue d’une mutation radicale pour polluer le moins possible. Par EM à Hong Kong Chronique simultanément publiée sur le site https://www.lessoireesdeparis.com/ édité par Philippe Bonnet EXPRESSION CANTONAISE : « Hek dāk fú jūng fú, fōng wàih yàhn seuhng yàhn » - « Celui qui est capable d’avaler ce qui est de plus amer parviendra au sommet de la société. » 35 degrés Celsius, un taux d’humidité de 80%, un ciel plombé, pas un souffle de vent, l’orage couve. Néanmoins, bravant la moiteur, vous rejoignez vos compagnons de course à pied sur la piste d’entraînement de l’hippodrome de Happy Valley. Vous n’avez pas commencé à courir que vous transpirez déjà à grosses gouttes. Sans vous départir pour autant de votre sens de l’humour, vous lancez à vos camarades de souffrance : « Hek dāk fú jūng fú, fōng wàih yàhn seuhng yàhn », soit « Celui qui est capable d’avaler ce qui est de plus amer parviendra au sommet de la société. » La première partie de cet idiome, « Hek dāk fú jūng fú », décrit un supplice double. Synonyme de « goût amer », « d’épreuve », de « souffrance » et « d’épuisement lié à l’effort », le mot « fú » (苦) est renforcé par « jūng » (中) qui signifie « le milieu ». En d’autres termes, « pour atteindre le faîte de la pyramide sociétale » (« fōng wàih yàhn seuhng yàhn »), il faut être « capable de manger » (« hek dāk ») l’amer du cœur de l’amer, « fú jūng fú », c’est-à-dire l’amer le plus amer ! Rassurez-vous, en l’an 2024, la leçon de ce vieux proverbe chinois, soumise à l’épreuve du temps, n’est plus prise au pied de la lettre. S’imposer de souffrir le calvaire pour grimper les échelons de la société est un concept tombé en désuétude. Au lieu du calice de l’amertume, les jeunes Hongkongais s’autorisent à savourer leur boisson crémeuse préférée, le « Yuenyeung » (prononcée « yūn yēung », 鴛鴦), mélange de café, de thé noir, de lait concentré et de sucre. Chaud ou froid, ce breuvage se boit en famille, avec des amis ou au bureau, avec des collègues. Lors de cette pause gourmande, il n’est d’ailleurs pas rare d’entendre le mot « fú » de l’expression « sān fú léih la » (辛苦你啦), soit « merci pour votre travail pénible ». A Hong Kong, loin d’être perdue, la notion du « travailler très dur » (« hóu sān fú », 好 辛苦) continue d’être respectée, avec comme récompense à la clé l’espoir d’un mode de vie plus confortable. « On n’a rien sans rien, » conclurait-on dans la langue de Molière. Par EM à Hong Kong Photo : 28/05/2019 Piste de course de l’hippodrome de Happy Valley - ©Keih Saht Le Lexique : Hek : Manger 吃 Dāk : Pouvoir, être capable de, possible 得 Fú : Amer, épreuve, souffrance, épuisement lié à l’effort 苦 Jūng : Milieu, centre, cœur, noyau 中 Fōng : Ensuite, dans un second temps (qui peut se remplacer par « sīn » dans le langage courant) 方 Sīn : D’abord puis, premièrement ensuite 先 Wàih : Devenir (qui peut se remplacer par « jauh » dans le langage courant) 為 Jauh : Dans ce cas alors, dans ces circonstances, transformation en conséquence 就 Yàhn : Homme, une personne 人 Yàhn seuhng yàhn : Le plus haut placé dans l’échelle sociale 人上人 « Sān fú léih la » : « Merci pour votre travail pénible » 辛苦你啦 Sān : Goût âcre 辛 Léih : Tu, toi 你 Hóu : Bien, beaucoup, très 好 « Hóu sān fú » : « Travailler très dur » 好 辛苦 Yūn yēung : Boisson Yuenyeung, couple de canards mandarins 鴛鴦 Jongler avec les mots : https://www.keihsahtle.com/jongler-avec-les-mots.html
EXPRESSIONS CANTONAISES : « Siu dou sei maahn, gám ge háu » - « Sourire comme la tuile de mah-jong 四萬 » / « sourire jusqu’aux oreilles » - « Siu dou gin ngàh, mh gin ngáahn » En France, « on sourit jusqu’aux oreilles ». Telle est la description du mouvement impulsif des lèvres provoqué par la joie, qui réhausse les joues. Cet élan joyeux transforme le visage tout entier. « Un sourire aux lèvres, ça éclabousse sur la frimousse (…) » chantonnait Maurice Chevalier. A Hong Kong, la description d’un grand sourire est plus théâtrale, plus imagée, un brin comique. Pour dépeindre cette expression de grand contentement, on dit « Siu dou gin ngàh, mh gin ngáahn » soit, « sourire jusqu’à découvrir les dents, empêchant de voir les yeux ». Révélant toute la dentition, un sourire éclatant est tellement large qu’il masque les yeux. En Chine, les dents du sourire sont une vraie source d’inspiration. Les joueurs ardents de Mah-jong (originaire du delta du fleuve Yangtze) les imaginent même dessinées sur les tuiles comportant l’inscription « 四萬 », combinaison de deux caractères qui se prononce « sei maahn » et signifie « quarante mille ». Selon les aficionados du jeu, les lignes du « 四 », déformées lors de leur incrustation sur la tuile de Mah-jong (en os de bœuf, en ivoire ou en plastique), ressemblent au dessin d’une bouche grande ouverte. A sa vue, les Cantonais pensent d’emblée à un état rieur. Afin de le décrire, ils disent donc « Siu dou sei maahn, gám ge háu », littéralement « Sourire comme la tuile 40 000, en forme de bouche ». Si vous perdez votre partie de Mah-jong, n'égarez pas votre sourire pour autant. Il faut le « garder aux lèvres pour voir la vie d’un petit air allègre » (selon Maurice Chevalier). Alors, rappelez-vous régulièrement des dents du « 四萬 » : A la longue, cette tuile pourrait bien devenir votre porte-bonheur. Par EM à Hong Kong Photo : 10/10/ 2024 Jeu de Mah-jong, tuile 四萬 - ©Keih Saht Le Lexique : Siu : Sourire 笑 Dou : Atteindre, jusqu’à 到 Gin : Voir, rencontrer 見 Ngàh : Dent 牙 Mh : Ne pas (expression de la négation au présent) 唔 Ngáahn : Œil 眼 Sei : Quatre 四 Maahn : Dix mille 萬 Sei Maahn : Quarante mille 四萬 Gám ge : Comme, de telle sorte que 噉嘅 Háu : Bouche 口 Màh jéuk : Mah-jong 麻雀 Jongler avec les mots : https://www.keihsahtle.com/jongler-avec-les-mots.html
EXPRESSION CANTONAISE : « A pòh jáu dāk faai, yāt dihng yáuh gú gwaai » - « Si une vieille femme court vite, c’est certain, il y a une bonne affaire. » Tandis que vous flânez dans une rue peu animée, le nez en l’air, occupé à jouer à reconnaître les caractères traditionnels peints sur les murs ou accrochés au-dessus des devantures des échoppes, soudain, une vieille femme, que vous n’aviez point entendue arriver, vous double à toute vitesse. Dans sa précipitation, celle-ci manque de peu de vous renverser ! Constatant la célérité inhabituelle de cette dame âgée, entièrement concentrée sur sa course, vous en déduisez : « A pòh jáu dāk faai, yāt dihng yáuh gú gwaai », c’est-à-dire, « si une vieille femme court vite, c’est certain, il y a une bonne affaire » qu’il ne faut pas rater. Faites confiance au bon sens local. Suivez ce guide expérimenté pour profiter de la promotion exceptionnelle qui vaut le détour. Peut-être, dénicherez-vous un marché de quartier dont vous ne soupçonniez point l’existence, puis, à votre tour, remplirez à ras bord votre panier d’emplettes à bon compte. Notons que dans ce contexte cocasse bien particulier, le mot « gú gwaai » (古怪), synonyme « d’étrange », prend le sens « d’exceptionnel », « d’occasion unique à ne pas manquer ». Certes, à notre époque, celle de l’âge d’or des influenceurs où le commerce numérique revendique le monopole des bons plans, l’expression « A pòh jáu dāk faai, yāt dihng yáuh gú gwaai » risque de tomber en désuétude. A moins, éventuellement, de remplacer « A pòh » par « Síu jé », c’est-à-dire « vieille dame » par « jeune femme ». Le pas accéléré de ces dernières, à l’approche des galeries marchandes, peut être le signe annonciateur d’un mini concert improvisé ou du passage, sur le stand éphémère d’une marque de luxe, des stars de la « Canto Danse Pop » hongkongaise, Anson Lo Hon-ting (盧瀚霆), Keung To (姜濤), ou Anson Kong Ip-sang (江𤒹生) surnommé AK, etc. Pour rencontrer les idoles de la jeunesse - dont la plupart est issue du « boys band » MIRROR - rejoignez la course ! Par EM à Hong Kong Photo: 21/06/2021 The Landmark (Central) - ©Keih Saht Le Une foule de jeunes femmes attend l’arrivée de Anson Lo et de Keung To. Cheung kēi (Karaoke) 唱K Quelques idoles de la jeunesse hongkongaise : MIRROR https://www.youtube.com/watch?v=0RCiNRtxmJ8 https://www.youtube.com/watch?v=LHOYqoFeIDE Anson Lo Hon-ting (盧瀚霆) https://www.youtube.com/watch?v=pO_AT49pu0k Dans les coulisses : https://www.youtube.com/watch?v=k2aelX1EWXs Keung To (姜濤) https://www.youtube.com/watch?v=WduQ58lpwKA https://www.youtube.com/watch?v=FKuvAeZJUUQ Anson Kong Ip-sang (江𤒹生) https://www.youtube.com/watch?v=EnuoUux8Kos https://www.youtube.com/watch?v=EtjAR4hkt8s Lexique : A pòh jáu dāk faai, yāt dihng yáuh gú gwaai ! 阿婆走得快, 一定有古怪! A pòh : Vieille femme, dame âgée 阿婆 Jáu : Courir, quitter 走 Dāk : Pouvoir, être capable de 得 Faai : Rapide 快 Yāt dihng : Certainement 一定 Yáuh : Il y a, avoir 有 Gú gwaai : Etrange, exceptionnel, occasion unique 古怪 Síu jé : Jeune femme 小姐 Jongler avec les mots : https://www.keihsahtle.com/jongler-avec-les-mots.html
EXPRESSION CANTONAISE : « Séui ji chīng, jāk mòuh yùh » - « Quand l’eau devient extrêmement claire, il n’y a plus de poisson. » Vous lisez, relisez votre relevé de gestion de portefeuille, déçu. Sa performance est, une fois de plus, en deçà de vos espérances. Pour autant, vous hésitez à placer les économies qu’il vous reste. Vers quelles classes d’actifs les allouer, est-ce le bon moment d’investir ? Devez-vous imiter vos amis hongkongais qui semblent réussir à faire fructifier leurs avoirs régulièrement, en dépit de n’importe quels aléas. Faut-il, comme eux, consulter un maître Feng Shui, faire confiance à la sagesse ancestrale cantonaise ? Selon cet ancien proverbe « Séui ji chīng, jāk mòuh yùh » - « Quand l’eau devient extrêmement claire, il n’y a plus de poisson. » Autrement dit, les affaires juteuses s’effectuent dans un environnement peu transparent, tandis que des règles du jeu limpides n’ont pas encore été imposées. Suivant cette sagesse, par exemple, les meilleurs investissements en cryptomonnaies auraient été effectués aux prémices de leurs existences. Ces actifs seraient voués à perdre de leur intérêt progressivement, au fur et à mesure de la réglementation renforcée de leurs échanges. Sans conteste, « Séui ji chīng, jāk mòuh yùh » est une incitation à la prise de risque. Encore faut-il avoir appris l’art de naviguer en eau trouble. Les sinologues ne manqueront pas de rappeler qu’il existe un enchaînement de six autres caractères à cet ancien proverbe ». Rarement dite de nos jours, cette suite, « yàhn ji chaat, jāk mòuh tòuh, » avertit que « celui qui observe à outrance, se retrouve sans ami. » L’intérêt de cette forme d’appel à la tolérance, certes passée de mode dans le langage courant, est de souligner la morale de l’histoire : La surveillance à outrance nuit à l’enrichissement, tant en argent qu’en amis. Par EM à Hong Kong Photo : 24/08/2021 Pêcheurs, Plage de Deep Water Bay, Hong Kong - ©Keih Saht Le Lexique : « Séui ji chīng, jāk mòuh yùh » : 水至清則無魚 « Yàhn ji chaat jāk mòuh tòuh » : 人至察則無徒 Afin d’énoncer ce proverbe aisément, donnez-vous des temps de respirations : Prononcez d’abord les trois premiers caractères, « Séui ji chīng », respirez, puis enchaînez avec « jāk mòuh yùh », comme une valse à trois temps. Séui : Eau 水 Ji : Extrêmement, trop, atteindre à la suite d’un procédé 至 Le sens de Ji s’approche de celui de dou (到), qui signifie atteindre. Chīng : Clair, limpide 清 Chīng (清), comme les fameuses plages de Clear Water Bay, autrement dit « Chīng Séui Wāan » (清水灣), dans la région de Sai Kung, à Hong Kong. Jāk : En conséquence, alors, ensuite 則 Jāk, qui est un ancien caractère, rarement usité désormais, peut être remplacé par jauh (就), doté d’un sens quasiment similaire. Mòuh : Sans, il n’y a pas 無 Yùh : Poisson 魚 Yàhn : L’homme, celui, celle 人 Chaat : Surveiller 察 Gíng chaat : Le policier, la policière 警察 Gíng : Alerter, l’alarme 警 Tòuh : Ami, compagnon, camarade 徒 Jongler avec les mots : https://www.keihsahtle.com/jongler-avec-les-mots.html
EXPRESSION CANTONAISE : « Faahn hei gūng sām » - « Sensation d’assoupissement après le repas. » Au centre de la grande table à manger, le plateau rond en verre tourne, tourne. A chaque fois qu’il s’arrête devant vous, un nouveau plat apparaît. Vous vous saisissez promptement de vos baguettes de droite, afin de vous servir hâtivement, de peur que, par le truchement du plateau tournant, le mets que convoitez ne soit trop vite « posté » aux convives de l’autre bout de la table. Finalement repus, que vous ayez dévoré goulûment ou savouré lentement chaque portion du festin, vous serez envahi par cette inéluctable sensation d’engourdissement, celle qui provient de la vague de sommeil accompagnant tout travail élaboré de digestion. C’est lors de cette lutte contre l’endormissement, que vous pourrez confirmer à votre hôte généreux que vous vous sentez « faahn hei gūng sām » (飯氣攻心), à savoir, « sur le point de vous assoupir après le repas ». Cette remarque ne s’entend pas seulement à l’issue des banquets festifs. « Faahn hei gūng sām » (飯氣攻心) se proclame dès que sieste fait nécessité, c’est-à-dire quotidiennement, car il est d’usage de déjeuner rapidement, avec du riz ou des nouilles. Un régime riche en glucides qui, fatalement, favorise la somnolence. Littéralement, « Faahn hei gūng sām » équivaudrait à « L’énergie vitale du riz attaque le cœur ». « Faahn » signifie « riz cuit, repas », « hei » (氣) « souffle, air », et « gūng sām » « attaquer le cœur ». Cette allégorie est, bien sûr, source de jeux de mots, comme s’y est amusé, avec malice, Sunny Chan Wing San. Pour le titre de la série de comédies à succès « Faahn hei gūng sām », le réalisateur a échangé le caractère 氣 de « hei » par 戲 (« film, spectacle »), transformant ainsi le sens de l’expression en… « Manger le spectacle assoupit » ! Les spectateurs hongkongais, quant à eux, ont compris le sens de l’humour du cinéaste. Ils étaient tout bonnement invités à aller voir un film procurant les mêmes bienfaits qu’une sieste, c’est-à-dire qui les détendrait. Et, il ne se sont pas trompés. Par EM à Hong Kong Photo: 02/11/2024 - MOViE MOViE Pacific Place (Admiralty) - ©Keih Saht Le Tái hei (Regarder au cinéma) : Regarder les films « Faahn hei gūng sām » (飯戲攻心) Titre en Anglais : « Table for six » 1) Bande annonce officielle, « Table for six », février 2022 https://www.youtube.com/watch?v=DLa_rXV_n84 2) Bande annonce officielle, « Table for six » 2, février 2024 https://www.youtube.com/watch?v=cOBaLhSVWjg Lexique : Tái hei : Regarder au cinéma 睇戲 Tái : Regarder 睇 Faahn : Riz cuit, repas 飯 Hei : Air, souffle 氣 Hei : Film, spectacle 戲 Gūng sām : Attaquer le cœur 攻心 Sām : Cœur 心 Jongler avec les mots : https://www.keihsahtle.com/jongler-avec-les-mots.html
EXPOSITION : Le Hong Kong Heritage Museum (HKHM) présente l’exposition « Timeless Diva : Anita Mui » (« Intemporelle Diva : Anita Mui »). Pour le plus grand bonheur des amoureux de Cantopop (terme décrivant la musique pop cantonaise populaire du Port au parfum), les costumes de scène de la « Fille de Hong Kong », en l’occurrence Anita Mui (Mui Yim-fong, 梅艷芳), sont exposés au Hong Kong Heritage Museum (HKHM) - le Musée du patrimoine de Hong Kong - jusqu’au 2 septembre 2024. L’intitulé de l’exhibition « Timeless Diva : Anita Mui » (« Intemporelle Diva : Anita Mui ») honore celle dont le talent, le parcours de vie hors du commun et le caractère intrépide ont provoqué une adulation unanime. Cette adoration de la superstar est légitimée par une voix sublime, un jeu théâtral exceptionnel et un don incontestable de l’avant-garde. Quant à sa personnalité authentique, celle-ci était extrêmement attachante, caractérisée par une attitude téméraire, frisant parfois l’insolence. Son cœur débordait de générosité et c’est cela que la génération, témoin du don de soi de l’emblème de l’âge d’or de la Cantopop, n’oublie pas. On ne compte plus les actions de philanthropie de l’icône hongkongaise. Photo: Au HKHM - « Timeless Diva : Anita Mui » - Affiche - 01/04/2024 - ©Keih Saht Le En particulier, d’aucuns se souviennent de son engagement pendant l'épidémie du syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS). Anita Mui s’était démenée pour que le concert « 1 : 99 » puisse récolter des fonds en faveur des victimes de l’épidémie. Le nom « 1 : 99 » faisait référence à la proportion « d’eau de javel sur eau » jadis recommandée par les autorités sanitaires, concernant les solutions de nettoyage anti-SRAS. Malgré de multiples embûches, le concert organisé avec Ellen Cheng du Hong Kong Performing Artistes Guild avait tout de même pu avoir lieu le samedi 24 mai 2003, au stade de Hong Kong. Parvenant à mobiliser les grandes stars Cantopop du moment, telles Andy Lau, Leon Lai, Aaron Kwok, Jacky Cheung, Nicholas Tse, Joey Yung, Sammi Cheng, Eason Chan, Kelly Chen et William So, l’événement audacieux aurait permis de rassembler 22 millions de dollars de Hong Kong environ. C’est pourquoi, un peu moins de 20 ans après, en novembre 2021, malgré les restrictions anti-covid en vigueur à l’époque, les Hongkongais, faisant fi de leur peur de la contamination, se sont rués pour découvrir le film biographique « Anita ». Réalisé par Longman Leung, écrit avec Jack Ng, cette œuvre cinématographique récente constitue un bel hommage à la « Fille de Hong Kong », interprétée par l’actrice Louise Wong. Dans les salles de cinéma, l’émotion était palpable. Peu de spectateurs retenaient les larmes qui coulaient sous leur masque de protection contre le coronavirus. Effectivement, la scène finale du film, rejouant les adieux poignants du monstre sacré à ses fans, en novembre 2003, est bouleversante. A 40 ans, sachant sa disparition proche en raison des complications d’un cancer du col de l’utérus, Anita Mui avait organisé une série de spectacles d’au revoir (« Anita Classic Moment Live 2003 ») au Colisée de Hong Kong. A cette occasion, elle avait réalisé l’acte symbolique d’épouser la scène. En début de représentation, elle était apparue transcendante de beauté dans une tenue de mariée rouge scintillante, sertie de fils dorés et de strass. L’artiste s’était ensuite changée plusieurs fois avant de revêtir, en fin de concert, une seconde robe de mariée. D’un style plus simple contrastant avec la première, celle-ci était blanche unie, ornée d’une traîne de 20 mètres de long. C’est dans ce vêtement de cérémonie que la diva avait entonné la fameuse « Sunset Melody » (« Mélodie du coucher de soleil », 夕陽之歌). Elle avait achevé de la chanter tout en quittant la scène, altière, émue et émouvante. En arrivant au niveau des coulisses, elle s’était retournée en direction de son public, puis, avec son large sourire, lui avait adressé un dernier salut en cantonais, « bāai baai » (« Bye Bye ») ! Les deux célèbres robes de mariée de la « Fille de Hong Kong » sont désormais des pièces de collection conservées précieusement au HKHM. Les visiteurs du musée peuvent les contempler à leur guise, non dans la galerie destinée à l’exposition temporaire « Timeless Diva : Anita Mui », mais dans celle, permanente, appelée « Hong Kong Pop 60+ ». Cet espace dédié au rayonnement de la musique populaire, des films, des programmes télévisés et radiophoniques du Port au parfum (de la fin de la Seconde Guerre mondiale au début des années 2000) mérite d’ailleurs plus qu’un détour. Quoi qu’il en soit, en admirant les diverses tenues de concert ou de remises de prix d’Anita Mui, toutes plus éblouissantes et originales les unes que les autres, n’oublions pas de remercier Eddie Lau. Le styliste talentueux est à la fois le donateur et le créateur de ces habits de scène prestigieux. Investi totalement dans l’épanouissement artistique de sa fidèle amie, il avait arrêté de travailler avec d’autres vedettes. Aujourd’hui, Eddie Lau continue de contribuer à des expositions en la mémoire de sa complice, sans jamais manquer de rappeler au public que, dans leur relation, la confiance était fondamentale : Il confie qu’il savait qu’elle tenait à lui et qu’elle savait qu’il tenait à elle. Et de conclure que, sans amour, on ne peut pas accomplir de tels actes créatifs. Par E.M. à Hong Kong Chronique simultanément publiée sur le site https://www.lessoireesdeparis.com/ édité par Philippe Bonnet « Tái hei » ( (睇戲), « Regarder le film ») : Bande annonce officielle du film « Anita » https://www.youtube.com/watch?v=E8wywQqHPgI Arts et célébrités : https://www.keihsahtle.com/arts-et-celebrites.html
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Janvier 2025
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Expression cantonaise
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